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[1995] 1 C.F. 483

A-874-92

Baker Energy Resources Corporation (appelante)

c.

Reading & Bates Construction Co. et Reading & Bates Horizontal Drilling Ltd. (intimées)

Répertorié : Reading & Bates Construction Co. c. Baker Energy Resources Corp. (C.A.)

Cour d’appel, juges Hugessen, Létourneau et McDonald, J.C.A.—Toronto, 27, 28 et 29 septembre; Ottawa, 17 octobre 1994.

Brevets — Contrefaçon — Établissement des comptes relatifs aux bénéfices — Recours en equity dont l’objet est d’empêcher que la personne s’enrichisse injustement — Le contrefacteur d’un brevet doit rendre compte à la fois des bénéfices irrégulièrement obtenus et de leur emploi subséquent — Il incombe au défendeur d’établir son droit à la répartition des bénéfices et de prouver l’absence de lien de causalité entre la contrefaçon et la partie des bénéfices qu’il réclame — En l’absence d’une telle preuve, on peut légitimement présumer que les bénéfices irrégulièrement réalisés ont été employés de façon à en tirer les bénéfices d’un homme d’affaires ordinaire et responsable — Les intimées ont droit aux bénéfices effectivement réalisés par suite de la contrefaçon du brevet — Des intérêts avant jugement ont été accordés même si aucune demande à cet effet n’avait été présentée — Comme les intérêts avant jugement sont des gains que le contrefacteur est réputé avoir tirés des bénéfices lorsqu’il fait défaut d’en rendre compte ainsi que la loi le requiert, il ne s’agit pas d’une question discrétionnaire — L’octroi d’intérêts composés est la règle, sous réserve du pouvoir discrétionnaire de la Cour lorsqu’une telle mesure équivaudrait à une punition — Dans une action en contrefaçon, le jugement n’est pas complet tant qu’il n’a pas été statué sur la reddition de compte quant aux bénéfices — Le retard à déposer le rapport a privé les demanderesses des bénéfices — Lorsqu’il y a défaut de rendre compte des bénéfices, il est raisonnable de présumer que la personne qui a irrégulièrement touché les bénéfices en a fait le meilleur usage possible — Les profits portent intérêts au taux préférentiel appliqué par les banques à charte aux prêts commerciaux qu’elles consentent — Le taux d’intérêt pratiqué au Canada s’applique parce que le contrat a été exécuté au Canada, les services étaient payables en dollars canadiens, la cause d’action a pris naissance au Canada et l’action a été intentée au Canada.

Restitution — Établissement des comptes relatifs aux bénéfices dans une affaire de contrefaçon de brevet — Recours en equity dont l’objet n’est pas de punir le contrefacteur mais d’empêcher qu’il ne s’enrichisse injustement — Fardeau de la preuve relativement aux bénéfices et à leur répartition — La Cour considère les bénéfices réalisés en contrefaisant le brevet et non ceux qui auraient été retirés en utilisant une méthode n’entraînant pas de contrefaçon — Des intérêts avant jugement ont été accordés sans qu’une demande à cet effet ne soit faite pour empêcher le contrefacteur de s’enrichir injustement en conservant les bénéfices irrégulièrement réalisés — L’equity exige l’octroi d’intérêts composés parce qu’ils sont imposés dans la vie commerciale.

Pratique — Renvois — Appel interjeté à l’encontre du jugement de première instance confirmant les conclusions formulées par un arbitre nommé pour l’établissement des comptes relativement aux bénéfices réalisés à la suite de la contrefaçon d’un brevet — Lors d’un appel interjeté en vertu de la Règle 506, le juge siégeant en révision ne doit pas modifier les conclusions à moins qu’il n’y ait eu une erreur de droit ou que les conclusions de fait ont été tirées de façon abusive ou arbitraire ou découlent d’une erreur manifeste et cruciale — Que le protonotaire entende des requêtes ou agisse comme arbitre, la Cour ne doit pas intervenir dans l’exercice de son pouvoir sauf si cet exercice est entaché d’une erreur flagrante.

Le présent appel a été interjeté à l’encontre d’une décision de la Section de première instance confirmant les conclusions formulées par un arbitre nommé pour l’établissement des comptes relativement aux bénéfices réalisés par l’appelante à la suite de la contrefaçon de la méthode brevetée par les intimées pour l’installation d’un gazoduc.

L’appelante a soutenu que le juge saisi de l’appel du rapport de l’arbitre était habilité à substituer ses propres conclusions à celles de l’arbitre, qu’il n’était pas lié par les positions prises par le protonotaire sur les questions de nature discrétionnaire et qu’il devait exercer son propre pouvoir discrétionnaire. L’appelante a en outre prétendu que c’est au demandeur qu’il incombe de prouver ses prétentions, qu’il réclame des dommages-intérêts ou qu’il fasse valoir son droit aux bénéfices. Quant à la comptabilisation des bénéfices, l’appelante a soutenu qu’un défendeur n’est redevable que de la différence entre les bénéfices réels réalisés et ceux qui l’auraient été au moyen de la méthode de substitution ne contrefaisant pas le brevet que l’appelante aurait été le plus susceptible d’utiliser. Selon l’appelante, elle aurait pu avoir recours à quatre autres méthodes pour installer le gazoduc et il lui en aurait coûté tout au plus 100 000 $ de plus. L’appelante s’est opposée à l’octroi d’intérêts avant jugement composés annuellement parce que cette mesure n’a pas été demandée dans la déclaration et qu’aucune modification n’a été présentée à cet effet. De plus, le juge siégeant en révision n’a pas tenu compte du fait que l’octroi d’intérêts avant jugement constituait un acte purement discrétionnaire et, par conséquent, il n’a pas reconnu qu’il jouissait d’un pouvoir discrétionnaire et ne l’a pas exercé. Il a en outre été avancé que la question de savoir s’il convient d’accorder des intérêts composés relevait du pouvoir discrétionnaire de la Cour et que, de façon générale, la Cour ne les accordait que dans le cas où le défendeur occupait une position fiduciaire et qu’il avait manqué à son obligation fiduciaire. Les intérêts avant jugement qui ont été accordés couraient de la date où l’appelante a touché les bénéfices, au mois de septembre 1983, à celle du jugement confirmant le rapport de l’arbitre. L’appelante a prétendu que les intérêts auraient dû cesser de courir à la date du jugement prononçant sur l’existence de la contrefaçon, savoir le 20 mars 1986.

Les questions en litige étaient les suivantes : (1) le rôle dévolu à la Cour par la Règle 506 des Règles de la Cour fédérale en matière de révision du rapport préparé par un arbitre; (2) le fardeau de preuve applicable quant au montant des bénéfices et quant à leur répartition; (3) la méthode à utiliser pour calculer le montant des bénéfices; (4) le pouvoir de la Cour d’ordonner le paiement d’intérêts avant jugement calculés au taux préférentiel et composés annuellement, et (5) la question de savoir s’il convient d’utiliser le taux d’intérêt appliqué aux États-Unis ou au Canada.

Arrêt : l’appel doit être rejeté.

Lors d’un appel du rapport d’un arbitre prévu par la Règle 506, un juge se trouve dans une position très similaire à celle de la Cour d’appel lorsqu’elle entend l’appel d’une décision de la Section de première instance, c’est-à-dire que le juge siégeant en révision ne doit modifier les conclusions de droit que si l’arbitre a commis une erreur de droit, et les conclusions de fait que si celles-ci sont incorrectes parce qu’elles sont tirées de façon abusive ou arbitraire ou parce qu’elles découlent d’une erreur manifeste et cruciale. Il ne faut pas intervenir dans l’exercice d’un pouvoir discrétionnaire par un protonotaire sauf si cet exercice est entaché d’erreur flagrante, c’est-à-dire s’il procède de l’application d’un mauvais principe ou d’une mauvaise appréciation des faits, ou s’il soulève des questions ayant une influence déterminante sur l’issue de la cause. Le même principe s’applique lorsque le protonotaire agit comme arbitre en vertu de la Règle 500.

Le redressement consistant à rendre compte des bénéfices lorsqu’il y a eu contrefaçon de brevet est un recours en equity dont l’objet n’est pas de punir le contrefacteur mais d’empêcher qu’il ne s’enrichisse injustement, en l’obligeant à remettre les bénéfices qu’il a irrégulièrement réalisés en contrefaisant le brevet. Lorsqu’un demandeur choisit de faire établir le compte des bénéfices réalisés par suite de la contrefaçon d’un brevet, c’est le contrefacteur et non le demandeur qui doit rendre compte des bénéfices irrégulièrement obtenus, et qui doit révéler et rendre ces bénéfices. Il doit rendre compte à la fois des bénéfices et de leur emploi subséquent, car le demandeur a droit aux deux. Le demandeur n’a qu’à établir le montant des gains tirés des actes ayant contrefait le brevet. Dans les cas où le défendeur soutient qu’une partie des bénéfices dont il rend compte ne provient pas de la contrefaçon, c’est à lui qu’il incombe d’établir son droit à la répartition des bénéfices et de prouver l’absence de lien de causalité entre la contrefaçon et la partie des bénéfices qu’il réclame. L’appelante n’a pas rendu compte de l’emploi subséquent des bénéfices qu’elle a irrégulièrement réalisés. L’arbitre et le juge siégeant en révision pouvaient légitimement présumer que l’appelante les avait employés de façon à en tirer les bénéfices qu’un homme d’affaires ordinaire et responsable chercherait vraisemblablement à réaliser.

Les intimées avaient droit aux bénéfices que l’appelante avait effectivement réalisés en contrefaisant le brevet, et non à ceux qu’elle aurait retirés si elle avait employé une méthode n’entraînant pas de contrefaçon. Il serait injuste et contraire à la nature du recours en equity qu’est la reddition de compte d’imposer un partage des bénéfices entre l’appelante et les intimées pour les motifs suivants : (1) le contrat était un contrat [traduction] « Pas de forage, pas d’argent ». L’échec signifiait une absence de gains et des pertes substantielles. L’arbitre pouvait légitimement conclure que l’appelante avait toujours eu l’intention de contrefaire le brevet des intimées. (2) Il fallait pour exécuter le contrat avoir recours à la méthode même élaborée par les intimées. (3) C’est le processus en entier qui a été contrefait. Il s’ensuit que la totalité des bénéfices retirés par l’appelante proviennent de la contrefaçon, c’est-à-dire de l’utilisation de la méthode brevetée. (4) Ni le juge de première instance ni la Cour d’appel n’ont prévu de mesures quant à la répartition des bénéfices. La Cour n’est pas habilitée à récrire le jugement rendu quant à l’existence de la contrefaçon. (5) L’arbitre et le juge siégeant en révision ont tous deux conclu que parmi les quatre méthodes de substitution proposées pour installer le gazoduc, celle qui était la plus susceptible d’être utilisée aurait contrefait le brevet. En supposant que les méthodes de substitution pour installer le gazoduc auraient pu être prises en considération, l’appelante n’a pas réussi à prouver qu’elles étaient disponibles et qu’elles étaient utiles et fonctionnelles, et à en établir le coût.

Compte tenu de la nature et de l’objet de la reddition de compte, le contrefacteur d’un brevet, qui sait qu’il doit rendre compte des bénéfices réalisés ainsi que des gains tirés de ces bénéfices, ne peut se plaindre d’être pris par surprise simplement parce que la déclaration ne contenait pas une demande de versement d’intérêts avant jugement. Le contrefacteur qui doit rendre compte des bénéfices peut être condamné au paiement d’intérêts avant jugement au titre des gains qu’il est réputé avoir tirés des bénéfices, même si le demandeur n’en a pas fait mention dans la déclaration initiale ou dans une requête visant à modifier celle-ci. Le contrefacteur doit avoir l’occasion de présenter des observations concernant des questions pertinentes, telles les taux d’intérêts, la périodicité à laquelle les intérêts sont composés (annuellement ou autrement) et la durée de la période pendant laquelle les intérêts courent.

Il faut considérer les intérêts avant jugement comme des bénéfices secondaires imputés au contrefacteur, c’est-à-dire comme des gains que celui-ci est réputé avoir tirés des bénéfices, lorsqu’il fait défaut d’en rendre compte ainsi que la loi le requiert. Il ne s’agit donc pas d’une question discrétionnaire. L’octroi d’intérêts sur les bénéfices retirés de l’exécution du contrat doit entrer dans l’évaluation des bénéfices auxquels le demandeur a droit et qu’il aurait touchés s’ils lui avaient été versés plutôt qu’au contrefacteur.

Étant donné que la réalité moderne veut que les intérêts courant sur des prêts ou produits par des dépôts soient des intérêts composés et la nécessité d’assurer l’équité dans la reddition de compte, l’octroi d’intérêts composés au titre de gains réputés tirés des bénéfices est la règle, sous réserve du pouvoir discrétionnaire de la Cour d’en atténuer l’application ou de n’accorder que les intérêts simples lorsque les circonstances le demandent. Dans l’exercice de son pouvoir discrétionnaire, le juge peut prendre en considération la bonne foi du contrefacteur, la validité de la revendication de brevet ou le fait que l’octroi d’intérêts composés déborde le domaine de l’équité pour entrer dans celui de la punition.

Dans une action en contrefaçon, lorsque le demandeur choisit la reddition de compte quant aux bénéfices, le jugement n’est pas complet tant que les comptes ne sont pas établis et qu’il n’a pas été statué sur le rapport de la personne désignée pour les établir. En objectant que l’arbitre a pris plus de deux ans pour déposer son rapport, alors que les intérêts avant jugement couraient, l’appelante oublie que pendant cette même période où elle avait en main le montant des bénéfices, les intimées en étaient privées. En outre, l’octroi d’intérêts composés ne constitue pas une punition mais ne fait que reconnaître l’existence d’une réalité.

Il incombait à l’appelante de rendre compte des gains tirés des bénéfices, sinon le montant des gains devait être estimé. Il est raisonnable de présumer que la personne qui a irrégulièrement touché des bénéfices en a fait le meilleur usage possible. Il n’y a rien à reprocher à la recommandation de l’arbitre voulant que les profits portent intérêts au taux préférentiel appliqué par les banques à charte aux prêts commerciaux qu’elles consentent. Il n’y avait rien d’incorrect à utiliser le taux d’intérêt pratiqué au Canada parce que le contrat a été exécuté au Canada, les services étaient payables en dollars canadiens, la cause d’action a pris naissance au Canada, l’action a été intentée au Canada et, dans les décisions qu’ils ont rendues, l’arbitre et le juge siégeant en révision ont ordonné que l’appelante rende les bénéfices en argent canadien. Il y aurait sous-compensation si l’on accordait aux demanderesses une somme en dollars canadiens et des intérêts avant jugement au taux américain, lequel est inférieur au taux canadien.

LOIS ET RÈGLEMENTS

Law Reform (Miscellaneous Provisions) Act, 1934 (R.-U.), 24 & 25 Geo. 5, ch. 41, art. 3.

Règles de la Cour fédérale, C.R.C., ch. 663, Règles 500, 506.

JURISPRUDENCE

DÉCISIONS APPLIQUÉES :

Algonquin Mercantile Corp. c. Dart Industries Canada Ltd., [1988] 2 C.F. 305; (1987), 17 C.I.P.R. 68; 16 C.P.R. (3d) 193; 79 N.R. 305 (C.A.); Canada c. « Jala Godavari » (Le) (1991), 40 C.P.R. (3d) 127; 135 N.R. 316 (C.A.F.); Canada c. Aqua-Gem Investments Ltd., [1993] 2 C.F. 425; (1993), 93 DTC 5080 (C.A.); Beloit Canada Ltd. c. Valmet Oy, [1994] F.C.J. no 682 (1re inst.) (QL); Wellcome Foundation Ltd. c. Apotex Inc. (1992), 40 C.P.R. (3d) 361 (C.F. 1re inst.); Teledyne Industries, Inc. et autres c. Lido Industrial Products Ltd. (1982), 68 C.P.R. (2d) 204 (C.F. 1re inst.); Beloit Canada Ltée/Ltd. c. Valmet Oy (1992), 45 C.P.R. (3d) 116 (C.A.F.).

DISTINCTION FAITE AVEC :

Invacare Corp. c. Everest & Jennings Cdn. Ltd. (1987), 14 C.I.P.R. 295; 15 C.P.R. (3d) 278; 3 F.T.R. 279 (C.F. 1re inst.); Gordon Form Lathe Co. v. Ford Motor Co. 133 F. 2d 487 (6th Cir. 1943).

DÉCISIONS EXAMINÉES :

Reading & Bates Construction Co. c. Baker Energy Resources Corp. (1986), 8 C.I.P.R. 250; 13 C.P.R. (3d) 410; 2 F.T.R. 241 (C.F. 1re inst.); conf. par (1987), 18 C.P.R. (3d) 180; 79 N.R. 351 (C.A.F.); O’Sullivan v. Management Agency and Music Ltd., [1985] Q.B. 428 (C.A.).

DÉCISIONS CITÉES :

Diversified Products Corp. c. Tye-Sil Corp. (1991), 35 C.P.R. (3d) 350; 125 N.R. 218 (C.A.F.); My Kinda Town Limited v. Soll and Another, [1983] R.P.C. 15 (Ch. D.); Amusement Corporation of America v. Mattson, 138 F. 2d 693 (5th Cir. 1943); Ductmate Industries Inc. c. Exanno Products Ltd. (1987), 15 C.I.P.R. 115; 16 C.P.R. (3d) 15; 12 F.T.R. 37 (C.F. 1re inst.); Corcoran v. Ehrlick Transport Ltd. et al. (1984), 46 O.R. (2d) 225; 12 D.L.R. (4th) 134; 27 M.V.R. 197; 3 O.A.C. 148 (C.A.); Theriault v. Day & Ross Ltd. and Monnier (1977), 21 N.B.R. (2d) 120; 37 A.P.R. 120 (C.A.); Engine and Leasing Co. et autres c. Atlantic Towing Ltd. (1992), 51 F.T.R. 1 (C.F. 1re inst.); Dictionnaires (Les) Robert Canada SCC et al. c. Librairie du Nomade Inc. et autres (1987), 16 C.P.R. (3d) 319; 11 F.T.R. 44 (C.F. 1re inst.); Apple Computer Inc. c. Mackintosh Computers Ltd., [1987] 1 C.F. 173; (1986), 28 D.L.R. (4th) 178; 8 C.I.P.R. 153; 10 C.P.R. (3d) 1; 3 F.T.R. 118 (1re inst.); Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique c. R.F.R. Holding Corp. et autres (1987), 13 C.P.R. (3d) 115 (C.F. 1re inst.); Belmont Finance Corpn v Williams Furniture Ltd (No 2), [1980] 1 All ER 393 (C.A.); Westinghouse Electric and Manufacturing Company v. Wagner Electric and Manufacturing Company, 225 U.S. 604 (1912); Éditions JCL Inc. c. 91439 Canada Ltée, [1995] 1 F.C. 380 (C.A.); Wallersteiner v Moir (No. 2), [1975] 1 All ER 849 (C.A.); Siddell v. Vickers (1892), 9 R.P.C. 152 (C.A.).

DOCTRINE

Law Reform Commission of British Columbia. Report on the Court Order Interest Act, Vancouver : Ministry of the Attorney General, 1987.

Manitoba Law Reform Commission. Report on Prejudgment Compensation on Money Awards : Alternatives to Interest, Report No. 47, Winnipeg : Queen’s Printer, 1982.

McGregor, Harvey. McGregor on Damages, 15th ed., London : Sweet & Maxwell, 1988.

Ontario Law Reform Commission. Report on Compensation for Personal Injuries and Death, Toronto : Ministry of the Attorney General, 1987.

Saxe, Dianne. « Judicial Discretion in the Calculation of Prejudment Interest » (1985-86), 6 Adv. Q. 433.

Waddams, S. M. The Law of Damages, 2nd ed., Toronto : Canada Law Book Inc., 1993.

APPEL interjeté à l’encontre du jugement de première instance rendu dans Reading & Bates Construction Co. c. Baker Energy Resources Corp. (1992), 44 C.P.R. (3d) 93; 56 F.T.R. 22 (C.F. 1re inst.), confirmant les conclusions formulées par un arbitre relativement aux bénéfices réalisés par le contrefacteur d’un brevet. Appel rejeté.

AVOCATS :

B. D. Edmonds pour l’appelante.

R. E. Dimock et B. Stratton pour les intimées.

PROCUREURS :

McCarthy Tétrault, Toronto, pour l’appelante.

Dimock & Associates, Toronto, pour les intimées.

Ce qui suit est la version française des motifs du jugement rendus par

Le juge Létourneau, J.C.A. : Le présent appel, interjeté à l’encontre d’une décision de la Section de première instance [(1992), 44 C.P.R. (3d) 93] confirmant les conclusions formulées par un arbitre nommé pour l’établissement des comptes relativement aux bénéfices réalisés par un contrefacteur de brevet, soulève d’intéressantes questions qui, pour certaines, sont soumises à la Cour pour la première fois. La Cour doit statuer sur les questions suivantes :

a) le rôle dévolu à la Cour par la Règle 506 des Règles de la Cour fédérale [C.R.C., ch. 663] en matière de révision du rapport préparé par un arbitre sous le régime de la Règle 500;

b) le fardeau de preuve applicable quant au montant des bénéfices lorsqu’il y a eu contrefaçon de brevet et quant à la répartition de ces bénéfices;

c) la méthode à utiliser pour calculer le montant des bénéfices dans un tel cas de contrefaçon;

d) le pouvoir de la Cour d’ordonner le paiement d’intérêts avant jugement calculés au taux préférentiel et composés annuellement;

e) la question de savoir s’il convient d’utiliser le taux d’intérêt appliqué aux États-Unis ou au Canada.

Au mois d’août 1983, les intimées ont intenté deux poursuites en contrefaçon contre l’appelante relativement à certaines revendications du brevet no 1,037,462, qui peut être décrit comme le « brevet de la chemise d’accompagnement » et à toutes les revendications du brevet no 1,140,106, qui peut être décrit comme le « brevet de rappel ».

De façon générale, le « brevet de la chemise d’accompagnement » porte sur une façon de forer un trou de guidage en plaçant un gainage sous un obstacle le long d’un parcours en forme d’arc inversé. Le « brevet de rappel » décrit une méthode permettant simultanément et séquentiellement de forer ce trou, de placer le gainage et de rappeler la gaine à l’aide d’un aléseur auquel est fixé la conduite de transport de gaz. Le juge Strayer a fait une brève description de ce processus dans les motifs qu’il a rendus, le 20 mars 1986, relativement à l’existence de la contrefaçon :

Pour l’essentiel, le procédé consiste à pousser et à diriger un tube non rotatif de faible diamètre dont l’extrémité comporte des gicleurs lançant de l’eau et de la boue ramenés ensuite par pompage le long du tube jusqu’à la tour de forage. L’effet abrasif de ce mélange d’eau et de boue permet de forer le trou par lequel passe le train de forage. Le train de forage est dirigé à partir de la tour de forage installée sur l’une des rives et s’incline tout d’abord dans le sol pour se redresser ensuite à l’horizontale sous la rivière et remonter de l’autre côté afin d’atteindre la surface. À mesure que ce travail s’effectue, un tube de plus grand diamètre, que l’on qualifie indifféremment de « gaine postérieure », de « tube d’usure » et de « tube de nettoyage » ou parfois même de « gainage servant de guide » est poussé en rotation autour du train de forage afin de le suivre jusque de l’autre côté du fleuve. Le train de forage est alors retiré et l’on fixe alors sur la gaine postérieure un aléseur (pour élargir davantage le trou) équipé d’un pivot le raccordant au gazoduc ou « tube de production » monté au préalable sur l’autre rive. L’ensemble est ramené en arrière le long du trou, la gaine postérieure étant tirée par la tour de forage installée de l’autre côté du fleuve, là où le forage a commencé. Grâce au pivot, la gaine postérieure tourne à mesure qu’elle est tirée en arrière sans entraîner la rotation du gazoduc[1].

La contrefaçon a été commise lors de l’installation d’un gazoduc sous le fleuve Saint-Laurent, près de Trois-Rivières (Québec), au cours de l’été 1983. L’appelante a foré un trou de guidage de la rive nord à la rive sud du fleuve, puis elle a commencé l’alésage et le rappel, une opération qui a duré trois jours.

Le juge de première instance a statué que les revendications 1 à 6 et 10 à 13 du « brevet de la chemise d’accompagnement » étaient invalides, mais a jugé qu’il y avait eu contrefaçon des revendications 1 à 9, 14 à 28, 33 à 44, 46 et 47 du « brevet de rappel » dans l’installation du pipeline. Les intimées ont choisi de faire établir les comptes des bénéfices que l’appelante avait réalisés par suite de la contrefaçon, et l’affaire a été renvoyée devant le protonotaire adjoint pour qu’il procède à cet établissement. La Cour d’appel a rejeté, le 20 novembre 1987[2], l’appel formé contre le jugement rendu relativement à l’existence de la contrefaçon.

Au mois de novembre 1989, le protonotaire adjoint a entendu la référence sur l’établissement des comptes relatifs aux bénéfices et a pris l’affaire en délibéré. Il a finalement déposé son rapport plus de deux ans après l’audience, au mois de janvier 1992. L’appelante a été déboutée de l’appel qu’elle a formé devant la Section de première instance contre la décision de l’arbitre, c’est pourquoi la Cour est saisie du présent appel.

Comme on peut l’imaginer, les faits et les incidents de procédure qui se sont produits en l’espèce sont infiniment plus complexes que ce bref résumé peut le laisser entrevoir. En abordant les divers motifs d’appel invoqués par l’appelante, j’aurai l’occasion, toutefois, de me montrer plus précis et de donner plus de détails.

A.        Le rôle de la Cour dans un appel interjeté sous le régime de la Règle 506 à l’encontre du rapport d’un arbitre

L’avocat de l’appelante soutient qu’à l’égard des questions de droit, le juge de la Section de première instance (ci-après appelé « le juge siégeant en révision »), saisi de l’appel du rapport de l’arbitre, était habilité à substituer ses propres conclusions à celles de l’arbitre. Il prétend également que le juge siégeant en révision n’était pas lié par les positions prises par le protonotaire sur les questions de nature discrétionnaire, et qu’il devait exercer son propre pouvoir discrétionnaire.

Il ressort clairement des décisions rendues par mon collègue le juge d’appel Hugessen dans les affaires Canada c. « Jala Godavari » (Le)[3] et Algonquin Mercantile Corp. c. Dart Industries Canada Ltd.[4] que le juge qui examine des conclusions de fait reposant sur une appréciation de la crédibilité des témoins, tirées par un arbitre qui a entendu ceux-ci, ne peut, à sa guise, infirmer ces conclusions et leur substituer les siennes. S’agissant de l’appel du rapport d’un arbitre prévu par la Règle 506, je suis d’avis que le juge siégeant en révision ne doit modifier les conclusions de droit que si l’arbitre a commis une erreur de droit, et les conclusions de fait que si celles-ci sont incorrectes parce qu’elles sont tirées de façon abusive ou arbitraire ou parce qu’elles découlent d’une erreur manifeste et cruciale[5]. En termes simples, le juge qui procède, sous le régime de la Règle 506, à la révision des conclusions d’un arbitre se trouve, en ce qui a trait aux questions de droit et de fait, dans une position très similaire à celle de la présente Cour quand elle entend l’appel d’une décision de la Section de première instance.

Lorsqu’il s’agit de contrôler l’exercice d’un pouvoir discrétionnaire par un protonotaire, les juges disposent de plus de latitude. L’arrêt Canada c. Aqua-Gem Investments Ltd. a établi que, dans un tel cas, il ne faut pas intervenir sauf si cet exercice est entaché d’erreur flagrante, c’est-à-dire s’il procède de l’application d’un mauvais principe ou d’une mauvaise appréciation des faits, ou s’il soulève des questions ayant une influence déterminante sur l’issue de la cause. Lorsque l’exercice d’un pouvoir discrétionnaire peut faire l’objet d’une révision, le juge reprend l’affaire depuis le début[6].

Bien que ce principe ait été formulé dans le contexte procédural où le protonotaire entend des requêtes, je crois qu’il s’applique également lorsque le protonotaire agit comme arbitre en vertu de la Règle 500. Dans l’affaire « Jala Godavari », précitée, mon collègue le juge Hugessen, J.C.A., en statuant sur le droit applicable à la révision des conclusions de fait formulées par un arbitre, a reconnu que ce dernier pouvait être un protonotaire. Que le protonotaire entende des requêtes ou agisse comme arbitre, par conséquent, le contrôle de l’exercice de son pouvoir discrétionnaire devrait avoir la même portée. (Lorsque l’arbitre est un juge, d’autres facteurs peuvent entrer en ligne de compte.)

B.        Le fardeau de la preuve relativement aux bénéfices et à leur répartition

Le redressement consistant à faire rendre compte des bénéfices lorsqu’il y a eu contrefaçon de brevet est un recours en equity dont l’objet n’est pas de punir le contrefacteur mais d’empêcher qu’il ne s’enrichisse injustement, en l’obligeant à remettre les bénéfices qu’il a irrégulièrement réalisés en contrefaisant le brevet[7].

Il a été répété à satiété que l’exercice de ce recours suscite des difficultés d’ordre pratique qui en diminuent quelque peu l’utilité. Dès 1892, le lord juge Lindley, de la Cour d’appel d’Angleterre, écrivait :

[traduction] Le demandeur avait donc parfaitement le droit de choisir, comme il l’a fait en l’occurrence, qu’il soit rendu compte des bénéfices; mais je ne connais aucune forme de reddition de compte qui soit ou puisse être plus difficile à réaliser que celle des bénéfices. On y a recours—et je l’ai vu faire à de nombreuses reprises—dans des affaires visant une société, lorsque le capital d’un associé décédé ou sortant est laissé dans l’entreprise et qu’une ordonnance de reddition de compte est rendue relativement aux bénéfices réalisés grâce à ce capital. Ces bénéfices s’apparentent à ceux qu’on peut tirer d’une invention. La difficulté d’établir le montant des bénéfices attribuables à une source donnée, quelle qu’elle soit, est énorme, au point que ce type de reddition de compte réussit rarement à satisfaire qui que ce soit. Les différends s’accumulent, les dépenses s’additionnent et le temps qui y est consacré est hors de proportion avec l’avantage qu’on finit par obtenir, à telle enseigne qu’en matière de sociétés, il me faut confesser n’avoir jamais eu connaissance de comptes rendus qui aient donné satisfaction à qui que ce soit. Je crois que dans presque tous les cas, les gens se lassent et se découragent. Par conséquent, même si la loi prévoit que le breveté a le droit de choisir le recours dont il se prévaudra, il ferait bien, en pratique, d’opter pour la détermination du montant des dommages-intérêts plutôt que de demander l’établissement des comptes relatifs aux bénéfices[8].

Ce recours donne souvent lieu, en effet, à la réouverture du débat judiciaire sur la nature et l’étendue de la contrefaçon, en raison des tentatives faites pour minimiser le montant des bénéfices réalisés ou pour en obtenir la répartition. Fait également l’objet d’un contentieux la question des bénéfices secondaires, c’est-à-dire la détermination du niveau et du montant des gains tirés des bénéfices réalisés par le défendeur. La question de la charge de la preuve, c’est-à-dire son ampleur et son attribution, constitue un élément capital d’un tel débat, et la présente espèce ne fait pas exception à la règle.

L’avocat de l’appelante affirme que dans une action en contrefaçon de brevet, c’est au demandeur qu’il incombe de prouver l’étendue des dommages qu’il a subis, ou, s’il choisit, comme en l’espèce, de demander un compte rendu des bénéfices réalisés par le défendeur, le montant de ces bénéfices et leur répartition. Selon l’avocat de l’appelante, le fait d’imposer cette charge de preuve au demandeur qui réclame les bénéfices ne crée pas de difficultés à celui-ci, car il peut se prévaloir pleinement de la procédure d’interrogatoire préalable et de communication de la preuve pour se procurer les renseignements en la possession du défendeur. Autrement dit, le demandeur doit prouver ses prétentions, qu’il réclame des dommages-intérêts ou qu’il fasse valoir son droit aux bénéfices.

Cet argument est certainement séduisant, mais il ne tient pas compte de la nature particulière du recours en reddition de compte. Lorsqu’un demandeur choisit de faire établir le compte des bénéfices réalisés par suite de la contrefaçon d’un brevet, c’est le contrefacteur et non le demandeur qui doit rendre compte des bénéfices irrégulièrement obtenus, et qui doit révéler et rendre ces bénéfices. De fait, il doit rendre compte à la fois des bénéfices et de leur emploi subséquent, car le demandeur a droit aux deux. Le demandeur n’a qu’à établir le montant des gains tirés des actes ayant contrefait le brevet. Si l’on acceptait l’argument de l’appelante et qu’on exigeait du demandeur qu’il prouve les bénéfices et la répartition qu’il convient d’en effectuer, on se trouverait à inverser les rôles et à imposer au demandeur de rendre compte des bénéfices auxquels il affirme avoir droit.

Sont applicables en l’espèce les conclusions du juge Addy selon lesquelles la reddition de compte visant les bénéfices réalisés par suite de la contrefaçon d’un brevet est similaire à celle que doit faire la personne reconnue coupable de détournement ou de mauvais usage de biens :

Lorsque le défendeur, comme en l’espèce, a été jugé coupable et qu’on lui a ordonné de rendre des comptes, cette dernière obligation lui incombe entièrement et sans réserve. À cet égard, le propriétaire des biens n’a absolument aucune preuve à fournir. Le jugement oblige le contrefacteur à rendre compte de la totalité du montant de tous les revenus qu’il a perçus par suite de l’usage des biens. Le fait de ne pas déclarer ce montant, par négligence ou sciemment, pourrait fort bien rendre le contrefacteur coupable d’outrage au tribunal. Le montant ainsi déclaré devient payable au propriétaire légitime des biens et ne pourrait être réduit que par la déduction des frais ou débours que le contrefacteur peut établir, par preuve directe, avoir effectivement engagés. Dans le cas d’une demande en dommages-intérêts, la charge de la preuve incombe au demandeur[9].

Vu ce qui précède, il devient évident que dans les cas où le défendeur soutient qu’une partie des bénéfices dont il rend compte ne provient pas de la contrefaçon, c’est à lui qu’il incombe d’établir son droit à la répartition des bénéfices et de prouver l’absence de lien de causalité entre la contrefaçon et la partie des bénéfices qu’il réclame.

En l’espèce, l’appelante n’a pas rendu compte conformément aux exigences de la loi de l’emploi subséquent des bénéfices qu’elle a irrégulièrement réalisés. Dans ces circonstances, l’arbitre et le juge siégeant en révision pouvaient légitimement présumer que l’appelante les avaient employés de façon à en tirer les bénéfices qu’un homme d’affaires ordinaire et responsable chercherait vraisemblablement à réaliser. Je reviendrai sur cette présomption lorsque j’aborderai la question du taux d’intérêt fixé par l’arbitre.

C.        La méthode utilisée pour établir le montant des bénéfices

L’avocat des intimées soutient que ses clientes ont droit à la totalité des bénéfices réalisés par l’appelante, et qu’il convient d’établir le montant de ceux-ci en ne déduisant des revenus perçus par l’appelante par suite de la contrefaçon que les dépenses ou déboursés qu’elle a effectivement engagés au cours de l’opération. Les recettes et les frais ayant été établis de consentement à, respectivement, 4 529 000 $ et 1 594 795 $, les bénéfices totaux réalisés par l’appelante se chiffrent donc à 2 934 205 $.

L’avocat de l’appelante propose une méthode de comptabilisation des bénéfices différente. Soutenant que le montant des bénéfices est établi en comparant les profits réalisés par la contrefaçon à ceux qui auraient pu l’être par une méthode ne contrefaisant pas le brevet, il fait valoir que l’appelante ne doit rendre compte et n’est redevable que de la différence entre les deux montants. En d’autres termes, le montant des bénéfices correspond à la différence entre les bénéfices réels réalisés et ceux qui l’auraient été au moyen de la méthode de substitution ne contrefaisant pas le brevet que l’appelante aurait été le plus susceptible d’utiliser. Il affirme que l’appelante pouvait avoir recours à quatre autres méthodes pour installer le gazoduc, et qu’il lui en aurait coûté tout au plus 100 000 $ de plus pour employer l’une ou l’autre d’entre elles[10]. En fait, l’appelante estime à 52 500 su11[11] le montant maximal qu’elle a épargné en utilisant l’invention des intimées.

En ce qui concerne cette méthode comptable, je suis d’avis qu’il faut considérer les bénéfices que l’appelante a effectivement réalisés en contrefaisant le brevet, et non ceux qu’elle aurait retirés si elle avait employé une méthode n’entraînant pas de contrefaçon. Ainsi que l’a fait remarquer le juge Rouleau dans l’affaire Beloit Canada Ltd. c. Valmet Oy[12] : « L’octroi de cette réparation vise à restituer les bénéfices réalisés à leur propriétaire légitime, soit le demandeur, de façon à éliminer tout enrichissement injuste du défendeur ». Les intimées ont choisi de recevoir les bénéfices que l’appelante avaient effectivement réalisés, et elles avaient le droit de se les faire remettre. Dans les circonstances de la présente espèce, en particulier, il serait injuste et contraire à la nature du recours en equity qu’est la reddition de compte d’imposer un partage des bénéfices entre l’appelante et les intimées. Si je devais donner raison à l’appelante, les intimées, qui ont perdu le contrat remporté par l’appelante à la suite du processus de soumission, recevraient 52 500 $, alors que l’appelante, qui a contrefait le brevet, conserverait des bénéfices d’un montant de 2 881 705 $. De nombreuses raisons nous imposent d’écarter ce résultat injuste.

Premièrement, le contrat passé relativement à l’installation du gazoduc sous le fleuve Saint-Laurent était un contrat [traduction] « Pas de forage, pas d’argent ». L’appelante assumait une obligation de résultat. Il n’est donc pas surprenant qu’elle ait fait appel à la méthode mise au point par les intimées, car c’était celle qui offrait le plus de garanties de réussite dans l’exécution de ce type de travaux—ce qui était essentiel—et qui lui permettait de les effectuer d’une façon rentable. C’était la première fois qu’on procédait à ce type d’installation de pipeline sur une distance de plus 5 200 pieds dans des sols alluviaux et limoneux. L’appelante connaissait les risques considérables associés à une telle entreprise. Elle connaissait également l’existence de la méthode des intimées et savait qu’il s’agissait d’une technique beaucoup plus fiable pour ce genre d’entreprise que les autres méthodes disponibles. Elle voulait réussir et non échouer, car ses bénéfices étaient en proportion de son succès. L’échec signifiait une absence de gains et des pertes substantielles. À mon avis, l’arbitre pouvait légitimement tirer, de tous ces facteurs, la conclusion de fait selon laquelle l’appelante avait toujours eu l’intention de procéder comme elle l’a fait et de contrefaire le brevet des intimées.

Deuxièmement, il fallait pour exécuter le contrat et installer le gazoduc avoir recours à une méthode de forage directionnel, d’alésage et de rappel[13], soit la méthode même élaborée par les intimées.

Troisièmement, c’est la méthode ou le processus en entier qui a été contrefait, puisque l’invention des intimées consiste précisément en une technique complète de forage directionnel séquentiel comportant une opération d’alésage et de rappel simultanés. Les revendications 1 et 6 du brevet no 1,140,106 décrivent ainsi le processus :

[traduction] 1. Une méthode permettant de placer un gainage dans le sol le long d’un avant-trou creusé précédemment en forme d’arc inversé, méthode qui comprend : le fait de tirer un ensemble aléseur en même temps que ledit gainage qui le suit dans le sol le long de l’arc inversé sans qu’il n’y ait de véritable rotation de ce gainage.

6. Une méthode conforme à la revendication 1 comprenant les étapes antérieures à la traction et à la mise en place d’un tube à deux extrémités le long dudit arc jusqu’à ce que le tube occupe entièrement l’avant-trou; la fixation de l’ensemble aléseur à une extrémité du tube; la fixation d’une extrémité du gainage à l’ensemble aléseur de façon qu’il suive celui-ci; et la traction du tube le long du trou sans rotation du gainage.

Il s’ensuit que la totalité des bénéfices retirés par l’appelante proviennent de la contrefaçon, c’est-à-dire de l’utilisation de la méthode brevetée.

Quatrièmement, le partage ou la répartition des profits irait à l’encontre de la décision que le juge de première instance a rendue relativement aux actions en contrefaçon en 1986, et que notre Cour a confirmée en 1987. Les deux décisions concluent que la totalité de l’opération de mise en place du gazoduc par l’appelante a contrefait la méthode des intimées. Le juge Strayer s’est ainsi prononcé :

« les revendications 1 à 9, 14 à 28, 33 à 44, 46 et 47 des lettres patentes canadiennes no 1 140 106 sont valides et ont été contrefaites par la société défenderesse Baker Energy Resources Corporation, lors de l’installation d’un gazoduc sous le fleuve St-Laurent, près de Trois-Rivières (Québec), au cours des mois de juillet et août 1983 »[14].

En d’autres termes, la totalité de l’exécution du contrat a été traitée comme une contrefaçon. Ni le juge de première instance ni la Cour d’appel n’ont prévu de mesures ou formulé de conclusions quant à la répartition des bénéfices.

L’avocat de l’appelante n’en voudrait pas moins voir la Cour interpréter strictement les mots « lors de l’installation d’un gazoduc » employés par le juge de première instance dans sa décision, laquelle a par la suite été approuvée par la présente Cour. Il fait valoir que la Cour avait conclu que la contrefaçon avait eu lieu « au cours de » l’installation et non « du fait de » celle-ci. Il déduit de l’utilisation de ces mots qu’il nous était possible de décider que la mise en place du gazoduc comportait deux étapes : l’une qui ne contrefaisait pas la méthode, c’est-à-dire le forage, et l’autre qui constituait une contrefaçon, c’est-à-dire l’alésage et le rappel simultanés et que, par conséquent, nous pourrions partager les bénéfices entre les intimées et l’appelante.

Ce qu’en fait l’appelante demande maintenant à la Cour, c’est de récrire le jugement rendu quant à l’existence de la contrefaçon. Je ne suis pas disposé à le faire, et la Cour n’a tout simplement pas compétence pour y procéder. De plus, comme il en a déjà été fait mention, le forage du trou n’était d’absolument aucune utilité pour l’appelante et pour sa cliente s’il ne s’inscrivait pas dans une opération globale comportant l’alésage et le rappel subséquents. C’est cela qui distingue la présente espèce du genre d’affaire où le brevet ne constitue qu’un élément de la production finale[15]. En l’espèce, le brevet visait la totalité de ce que l’appelante a vendu à sa cliente.

Cinquièmement, l’arbitre et le juge siégeant en révision ont tous deux conclu que parmi les quatre méthodes de substitution proposées par l’appelante pour installer le gazoduc, celle qui était la plus susceptible d’être utilisée (la méthode A) aurait contrefait le brevet en cause[16]. Quant aux trois autres (les méthodes B, C et D)[17], ou bien elles n’étaient pas disponibles au moment de l’installation ou bien elles étaient théoriques ou comportaient tellement d’impondérables qu’elles n’étaient ni rentables ni fonctionnelles.

En supposant que ces méthodes de substitution eussent pu être prises en considération dans la détermination des bénéfices, c’est à l’appelante qu’il incombait de prouver qu’elles étaient disponibles et qu’elles étaient utiles et fonctionnelles dans des conditions similaires à celles du travail qui a été accompli, et d’en établir le coût. Sur ce point, elle n’a manifestement pas réussi à convaincre l’arbitre et le juge siégeant en révision. Les témoignages écrits et oraux renfermaient suffisamment d’éléments[18] permettant à l’arbitre de tirer les conclusions auxquelles il est parvenu. À mon avis, le juge siégeant en révision a eu raison de confirmer les conclusions de l’arbitre sur ces questions, car elles étaient bien fondées.

D.        Le pouvoir de la Cour d’octroyer des intérêts avant jugement calculés au taux préférentiel et composés annuellement

a)         L’absence de demande d’intérêts avant jugement dans la déclaration

L’appelante s’oppose à l’octroi d’intérêts avant jugement composés annuellement. Elle fait valoir, premièrement, que cette mesure n’a pas été demandée dans la déclaration et qu’en l’absence de requête visant à modifier cette plaidoirie, aucun intérêt avant jugement n’aurait dû être accordé. Au soutien de cette position, elle cite la décision rendue par la Section de première instance dans l’affaire InvacareCorp. c. Everest & Jennings Cdn. Ltd.[19], où la Cour avait refusé, pour cette raison même, d’octroyer des intérêts avant jugement.

Il me faut préciser dès le début que l’affaire Invacare Corp. ne portait pas sur une reddition de compte concernant des bénéfices. En cette matière, je préfère la démarche suivie par le juge MacKay dans l’affaire Wellcome Foundation Ltd. c. Apotex Inc.; il écrit, dans sa décision :

En ce qui concerne tout au moins la comptabilisation des profits, mesure de réparation dérivée de l’equity qui repose sur le principe selon lequel celui qui détourne le bien d’autrui ne peut s’enrichir injustement, l’intérêt avant jugement a toujours fait partie de cette comptabilisation (voir le juge Addy dans Teledyne Industries Inc. c. Lido Industrial Products Ltd. (1982), 68 C.P.R. (2d) 204, aux p. 223, 226 et 227, 31 C.P.C. 285 (C.F. 1re inst.), et le juge Reed dans Ductmate Industries Ltd. c. Exanno Products Ltd. (1987), 16 C.P.R. (3d) 15 aux p. 20 et 22; 15 C.I.P.R. 115 (C.F. 1re inst.)[20].

Le fait d’empêcher le contrefacteur, qui sait qu’il est susceptible d’avoir à rendre compte des bénéfices réalisés ainsi que des gains tirés de ces bénéfices, de s’enrichir injustement participe de la nature du redressement que constitue la reddition de compte relative aux bénéfices. Le contrefacteur devrait savoir que le montant de ces gains peut être établi par présomption s’il fait défaut d’en rendre compte; il ne peut donc se plaindre d’être pris par surprise simplement parce que la déclaration ne contenait pas de demande de cette nature.

J’estime que le contrefacteur qui doit rendre compte des bénéfices peut être condamné au paiement d’intérêts avant jugement au titre des gains qu’il est réputé avoir tirés des bénéfices, même si le demandeur n’en a pas fait mention dans la déclaration initiale ou dans une requête visant à modifier celle-ci. Naturellement, le contrefacteur doit avoir l’occasion de présenter des observations concernant des questions pertinentes, telles les taux d’intérêts, la périodicité à laquelle les intérêts sont composés (annuellement ou autrement) et la durée de la période pendant laquelle les intérêts courent.

b)         Le droit à des intérêts avant jugement

L’appelante soutient que le juge siégeant en révision n’a pas tenu compte du fait que l’octroi d’intérêts avant jugement constituait un acte purement discrétionnaire et que, par conséquent, il n’a pas reconnu qu’il jouissait d’un pouvoir discrétionnaire et ne l’a pas exercé.

J’ai déjà indiqué clairement qu’il fallait considérer les intérêts avant jugement comme des bénéfices secondaires imputés au contrefacteur, c’est-à-dire comme des gains que celui-ci est réputé avoir tirés des bénéfices, lorsqu’il fait défaut d’en rendre compte ainsi que la loi le requiert. Il ne s’agit donc pas d’une question discrétionnaire.

Je partage l’opinion exprimée par le juge siégeant en révision et par le juge Addy dans l’affaire Teledyne Industries, Inc. et autres c. Lido Industrial Products Ltd.[21], selon laquelle l’octroi d’intérêts sur les bénéfices retirés de l’exécution du contrat doit entrer dans l’évaluation des bénéfices auxquels le demandeur a droit et qu’il aurait touchés s’ils lui avaient été versés plutôt qu’au contrefacteur.

c)         Les intérêts doivent-ils être composés?

S’appuyant sur quelques décisions antérieures de la Section de première instance de la Cour[22], l’avocat de l’appelante a prétendu que la question de savoir s’il convient d’accorder des intérêts composés plutôt que des intérêts simples relève du pouvoir discrétionnaire de la Cour. Il a soutenu que, de façon générale, la Cour ne les accorde que dans le cas où le défendeur occupe une position fiduciaire et qu’il a manqué à son obligation fiduciaire[23].

Dans l’arrêt O’Sullivan v. Management Agency and Music Ltd.[24], la Cour d’appel anglaise a insisté sur la différence qui existait entre la règle de common law d’une part et la règle prévue par l’equity. Selon cette dernière règle, il est possible d’octroyer des intérêts composés lorsque les profits réalisés par suite du manquement à l’obligation fiduciaire ont été remployés dans l’entreprise[25]. Cette distinction s’explique par le fait que le système d’equity considère les avantages obtenus par l’auteur de la faute plutôt que les pertes causées à la victime.

Il a été décidé dans un certain nombre d’affaires canadiennes que le contrefacteur d’un brevet doit être considéré comme le fiduciaire du demandeur, et comme un fiduciaire ayant frauduleusement détourné des fonds, pour que des intérêts composés soient accordés[26]. Aux États-Unis, où le recours en reddition de compte a été aboli en 1946[27], on trouve aussi exprimée la notion voulant qu’un fiduciaire coupable ne puisse, selon les principes reconnus en equity, tirer profit de son délit[28].

Sans aucun doute, l’analogie entre le contrefacteur et le fiduciaire n’est pas parfaite, mais il s’agit d’un raisonnement que les tribunaux, dans leur effort pour parvenir à l’équité, ont élaboré à une époque où la common law ne permettait pas l’octroi d’intérêts avant jugement[29], mais où l’equity commençait à l’accepter. Dans ce dernier système, le raisonnement a fini par mener à l’octroi d’intérêts composés parce que ceux-ci sont devenus une réalité moderne et se sont imposés dans la vie commerciale. La réalité moderne veut que les intérêts courant sur des prêts ou produits par des dépôts soient des intérêts composés[30].

À mon avis, vu cette réalité et la nécessité d’assurer l’équité dans la reddition de compte, l’octroi d’intérêts composés au titre de gains réputés tirés des bénéfices est la règle, sous réserve du pouvoir discrétionnaire de la Cour d’en atténuer l’application ou de n’accorder que des intérêts simples lorsque les circonstances le demandent. La bonne foi du contrefacteur peut certes être prise en considération dans l’exercice de ce pouvoir discrétionnaire[31]. D’autres facteurs peuvent être examinés, dont la validité douteuse de la revendication de brevet ou le fait que l’octroi d’intérêts composés déborde le domaine de l’équité pour entrer dans celui de la punition.

En l’espèce, je ne vois aucune raison d’intervenir dans l’octroi d’intérêts avant jugement composés.

d)         La durée de la période devant servir au calcul des intérêts avant jugement

L’appelante se plaint de ce que le juge siégeant en révision a accordé des intérêts avant jugement courant de la date où elle a touché les bénéfices, au mois de septembre 1983, à celle du jugement confirmant le rapport de l’arbitre. Selon elle, ils auraient dû cesser de courir à la date du jugement prononçant sur l’existence de la contrefaçon, savoir le 20 mars 1986.

Cette affirmation ne saurait tenir. Dans une action en contrefaçon, le jugement n’est pas complet tant que le montant des dommages-intérêts n’est pas déterminé ou, dans le cas d’une reddition de compte quant aux bénéfices, tant que les comptes ne sont pas établis et qu’il n’a pas été statué sur le rapport de la personne désignée pour les établir.

L’appelante objecte qu’elle a subi un préjudice du fait que l’arbitre a pris plus de deux ans pour déposer son rapport, alors que les intérêts avant jugement couraient. À mon avis, elle oublie que pendant cette même période où elle avait en main le montant des bénéfices, les intimées en étaient privées. Son objection, en outre, ne tient pas compte du fait que dans le présent contexte, l’octroi d’intérêts composés ne constitue pas une punition, mais ne fait que reconnaître l’existence d’une réalité.

e)         Le taux des intérêts avant jugement et le choix du taux canadien ou américain

L’appelante affirme qu’il n’existe aucun fondement raisonnable à la présomption selon laquelle elle aurait remployé les profits réalisés grâce au contrat dans son entreprise au lieu d’emprunter au taux préférentiel. C’est oublier que c’est à elle qu’il incombe de rendre compte des gains tirés des bénéfices, et que si elle ne s’acquitte pas de cette obligation, le montant des gains doit être estimé en recourant à des présomptions. Ainsi que l’a écrit mon collègue le juge d’appel Hugessen dans la décision Beloit Canada Ltée/Ltd. c. Valmet Oy[32] : « [n]ous ne voyons, en principe, aucune raison pour laquelle un breveté, dont la propriété a abusivement été appropriée par voie de contrefaçon, ne devrait pas recouvrer tous les profits, directs et indirects, que l’auteur de la contrefaçon a tirés de sa contrefaçon illégale ».

Dans la détermination du montant des gains tirés des bénéfices, il est raisonnable de présumer que la personne qui a irrégulièrement touché des bénéfices en a fait le meilleur usage possible. S’agissant de l’appelante, celle-ci aurait notamment pu les utiliser dans le cours de ses opérations commerciales ou pour aider ses filiales, le cas échéant[33]. Par conséquent, je ne trouve rien à reprocher à la recommandation de l’arbitre voulant que les profits portent intérêts au taux préférentiel appliqué par les banques à charte aux prêts commerciaux qu’elles consentent.

À cet égard, l’appelante prétend que c’est le taux en vigueur aux États-Unis qui aurait dû être appliqué pour déterminer le montant des bénéfices secondaires. Selon elle, l’arbitre et le juge siégeant en révision ont supposé à tort que, parce que l’intimée Reading & Bates Horizontal Drilling Ltd. était une société canadienne, les bénéfices seraient utilisés au Canada. Elle soutient, à l’appui de son argument, qu’il s’agit d’une société américaine ayant son siège social au Texas, et qu’il est fort probable qu’elle aurait rapatrié ses bénéfices aux États-Unis. De plus, si elle avait emprunté, elle l’aurait probablement fait aux États-Unis.

En l’espèce, je ne vois rien d’incorrect à utiliser, dans le calcul des gains que l’appelante a retirés de ses bénéfices, le taux d’intérêt pratiqué au Canada. Le contrat a été exécuté au Canada et les services étaient payables en dollars canadiens et non en dollars américains. En outre, la cause d’action a pris naissance au Canada, l’action a été intentée au Canada et, dans les décisions qu’ils ont rendues, l’arbitre et le juge siégeant en révision ont ordonné que l’appelante rende les bénéfices en argent canadien. Comme le professeur Waddams le fait judicieusement remarquer, les tribunaux doivent faire montre de prudence avant d’adjuger des intérêts à un taux étranger, car le fait pour le demandeur de recouvrer le montant du jugement en devises étrangères et de toucher des intérêts avant jugement au taux canadien pourrait mener à une surcompensation lorsque ce taux est supérieur à celui de la devise étrangère[34]. L’inverse est également vrai; il y aurait sous-compensation en l’espèce si l’on accordait aux demanderesses une somme en dollars canadiens et des intérêts avant jugement au taux américain, lequel est inférieur au taux canadien.

Pour ces motifs, l’appel devrait être rejeté avec dépens.

Le juge Hugessen, J.C.A. : Je souscris à ces motifs.

Le juge McDonald, J.C.A. : Je souscris à ces motifs.



[1] (1986), 8 C.I.P.R. 250 (C.F. 1re inst.), aux p. 258 et 259.

[2] (1987), 18 C.P.R. (3d) 180 (C.A.F.).

[3] (1991), 40 C.P.R. (3d) 127 (C.A.F.).

[4] [1988] 2 C.F. 305 (C.A.).

[5] Diversified Products Corp. c. Tye-Sil Corp. (1991), 35 C.P.R. (3d) 350 (C.A.F.).

[6] [1993] 2 C.F. 425 (C.A.).

[7] My Kinda Town Limited v. Soll and Another, [1983] R.P.C. 15 (Ch.D.), à la p. 55; Amusement Corporation of America v. Mattson, 138 F. 2d 693 (5th Cir. 1943), à la page 697; Ductmate Industries Inc. c. Exanno Products Ltd. (1987), 15 C.I.P.R. 115 (C.F. 1re inst.); Teledyne Industries, Inc. et autres c. Lido Industrial Products Ltd. (1982), 68 C.P.R. (2d) 204 (C.F. 1re inst.).

[8] Siddell v. Vickers (1892), 9 R.P.C. 152 (C.A.), aux p. 162 et 163.

[9] Teledyne Industries, Inc. et autres c. Lido Industrial Products Ltd. (1982), 68 C.P.R. (2d) 204 (C.F. 1re inst.), à la p. 209.

[10] Voir la transcription des procédures, vol. I, aux p. 165 et 166.

[11] Voir le dossier d’appel, vol. V, à la p. 710, l’affidavit de M. Garrett, témoin expert pour l’appelante.

[12] [1994] F.C.J. no 682 (1re inst.) (QL).

[13] Voir les stipulations contractuelles, dossier d’appel, vol. III, à la p. 292.

[14] Voir le dossier d’appel, vol. I, à la p. 152, la décision du juge de première instance, et vol. VI, p. 859, à la p. 887 la décision de la Cour d’appel affirmant que le juge de première instance n’a commis aucune erreur en concluant que le brevet portait sur un processus d’alésage et de rappel simultanés.

[15] Voir par exemple Gordon Form Lathe Co. v. Ford Motor Co., 133 F. 2d 487 (6th Cir. 1943), dans laquelle la réalisation de l’invention consistait en un tour pour arbres à cames de moteurs d’automobiles.

[16] Pour une description de cette méthode, voir l’affidavit de M. Garrett aux p. 705 et 708 du dossier d’appel, vol. V. Quant à la contrefaçon que comporte son utilisation, voir le témoignage de M. Garrett aux p. 107 à 128 de la transcription des procédures, vol. II.

[17] Pour une description de ces méthodes, voir le dossier d’appel, vol. V, aux p. 706 à 710.

[18] La preuve a révélé que les intimées avaient déjà tenté sans succès d’employer la méthode A en essayant d’installer un pipeline. La méthode avait échoué et les intimées avaient subi une perte de 1,7 million de dollars. Voir la transcription des procédures, vol. I, aux p. 87 et 88 et 203 et 204. La méthode B n’avait été utilisée qu’une fois au cours de la centaine de travaux dont le témoin de l’appelante avait eu connaissance. Elle a été utilisée pour traverser une rivière, plus de cinq ans après l’installation du gazoduc sous le fleuve Saint-Laurent, dans des conditions très différentes et beaucoup plus favorables. Pourtant, l’entreprise avait subi des pertes de 200 000 $ à cette occasion. Voir la transcription des procédures, vol. II, aux p. 134 à 141. Quant à l’impossibilité de recourir à la méthode C sur une distance supérieure à 5 200 pieds, c’est-à-dire la distance à franchir pour traverser le Saint-Laurent, voir la transcription des procédures, vol. I, aux p. 206 et 207. Selon le témoin, la distance était trop grande et le tube d’un trop faible diamètre. La méthode D ne convenait pas dans le cas du projet du Saint-Laurent et aurait pu provoquer une rupture par torsion, ce qui aurait nécessité l’abandon du trou et un nouveau forage. Voir la transcription des procédures, vol. I, aux p. 208 à 210.

[19] (1987), 14 C.I.P.R. 295 (C.F. 1re inst.), à la p. 297. Toutefois, voir également Corcoran v. Ehrlick Transport Ltd. et al. (1984), 46 O.R. (2d) 225 (C.A.) et Theriault v. Day & Ross Ltd. and Monnier (1977), 21 N.B.R. (2d) 120 (C.A.), où des intérêts avant jugement ont été accordés même s’il n’en avait pas été fait mention dans la déclaration.

[20] (1992), 40 C.P.R. (3d) 361 (C.F. 1re inst.), à la p. 373.

[21] (1982), 68 C.P.R. (2d) 204 (C.F. 1re inst.).

[22] Engine and Leasing Co. et autres c. Atlantic Towing Ltd. (1992), 51 F.T.R. 1 (C.F. 1re inst.), à la p. 44; Dictionnaires (Les) Robert Canada SCC et al. c. Librairie du Nomade Inc. et autres (1987), 16 C.P.R. (3d) 319 (C.F. 1re inst.); Apple Computer Inc. c. Mackintosh Computers Ltd., [1987] 1 C.F. 173 (1re inst.); Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique c. R.F.R. Holding Corp. et autres (1987), 13 C.P.R. (3d) 115 (C.F. 1re inst.).

[23] Voir par exemple les décisions anglaises Belmont Finance Corpn v Williams Furniture Ltd (No 2), [1980] 1 All ER 393 (C.A.), à la p. 419; O’Sullivan v. Management Agency and Music Ltd., [1985] Q.B. 428 (C.A.), à la p. 461 et aux p. 473 et 474.

[24] Id.

[25] Id., à la p. 461.

[26] Voir Teledyne Industries, Inc. et autres c. Lido Industrial Products Ltd. (1982), 68 C.P.R. (2d) 204 (C.F. 1re inst.); Ductmate Industries Inc. c. Exanno Products Ltd. (1987), 15 C.I.P.R. 115 (C.F. 1re inst.).

[27] 69 C.J.S. Patents, art. 357, à la p. 1098.

[28] Westinghouse Electric and Manufacturing Company v. Wagner Electric and Manufacturing Company, 225 U.S. 604 (1912), à la p. 620.

[29] Voir par exemple l’art. 3(1) de la Law Reform (Miscellaneous Provisions) Act, 1934 [(U.K.), 24 & 25 Geo. 5, ch. 41] d’Angleterre qui modifiait la loi et permettait l’octroi d’intérêts avant jugement sur une dette ou sur des dommages-intérêts, mais qui interdisait d’accorder des intérêts sur les intérêts. Au Canada, une réforme semblable a débuté dans les années 1970. Voir Dianne Saxe, « Judicial Discretion in the Calculation of Prejudgment Interest » (1985-86), 6 Adv. Q. 433, aux p. 435 et 436. Pour une étude de l’évolution de la common law relativement à la question des intérêts, voir McGregor on Damages, 15e éd., Sweet and Maxwell Ltd., Londres, 1988, à la p. 573.

[30] De fait, la British Columbia Law Reform Commission et la Commission de réforme du droit de l’Ontario ont toutes deux recommandé que soit prévu, en common law, un droit général aux intérêts composés. Voir les rapports de chaque organisme, Report on the Court Order Interest Act, Law Reform Commission of British Columbia, 1987, et Report on Compensation for Personal Injuries and Death, Commission de réforme du droit de l’Ontario, 1987. Dans son document intitulé Report on Prejudgment Compensation on Money Awards : Alternatives to Interest, no 47, 1982, la Commission manitobaine de réforme du droit n’a trouvé aucun motif économique justifiant de refuser l’octroi d’intérêts composés.

[31] Éditions JCL Inc. c. 91439 Canada Ltée, [1995] 1 C.F. 380 (C.A.).

[32] (1992), 45 C.P.R. (3d) 116 (C.A.F.), à la p. 119.

[33] Voir Wallersteiner v Moir (No. 2), [1975] 1 All ER 849 (C.A.), aux p. 855 et 856, lord Denning, M.R.

[34] S. M. Waddams, The Law of Damages, 2e éd., Canada Law Book Inc., Toronto, 1993, aux p. 7-39 et 7-40.

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